Imaginez un instant que votre coiffeur, au lieu d’être payé par vous directement, était payé par le fabricant de fixatif pour les cheveux… Quelle quantité de cette gomme pensez-vous que vous auriez dans les cheveux en sortant de là? Je suis ravi de payer mon coiffeur chaque fois que je vais le voir, et de savoir que j’aurai la coupe que je veux!
Les organismes qui réglementent le secteur des investissements refusent de s’imposer et d’exiger la même chose dans le cas de votre relation avec votre conseiller financier. Et c’est un problème.
Je vous ai fourni les liens vers tous les articles mentionnés dans la description qui suit. Jetez-y un coup d’œil et faites-moi part de vos réactions.
Il y a six ans que les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié un document de discussion sollicitant des commentaires sur la structure de tarification des organismes de placement collectif au Canada1. Plusieurs documents sur le sujet ont été publiés depuis2, et ils démontrent clairement que les fonds ayant des commissions intégrées influencent les décisions des conseillers dans un sens qui nuit aux intérêts des clients.
Que-sont les commission?
Laissez-moi tout d’abord définir ce que sont les commissions intégrées et expliquer leur fonctionnement. Les commissions intégrées sont versées aux conseillers par les sociétés de fonds, soi-disant pour les conseils qu’ils fournissent à leurs clients. En réalité, ces commissions sont simplement des incitatifs à la vente.
Une commission de suivi est un paiement annuel versé à un conseiller par une société de fonds communs de placement, qui représente un pourcentage de la valeur détenue par le client dans le fonds, habituellement environ 1 %. Les frais d’entrée sont une commission qui est payée au conseiller à la vente d’un fonds à un client, encore une fois selon un pourcentage de la valeur détenue dans le fonds. Ces frais peuvent atteindre 5 % de cette valeur. Les frais de vente reportés sont une pénalité imposée au client qui vend un fonds commun de placement dans les cinq ou sept années suivant son acquisition. Cette pénalité est un pourcentage de la valeur détenue dans le fonds et elle diminue généralement de manière linéaire avec les années. Elle aide la société de fonds à récupérer les frais d’entrée versés au conseiller dans le cas où le client n’a pas conservé son placement dans le fonds assez longtemps pour que les frais de gestion annuels compensent.
Les changements au Canada
Quelles sont les conclusions des études sur l’impact de ce type de rémunération pour les conseillers? En voici quelques-unes… et elles sont accablantes :
- Les fonds qui paient des commissions de suivi ont des rendements inférieurs.
- Les conseillers poussent les investisseurs vers des fonds plus risqués, en raison des divers niveaux de commissions de suivi.
- Les recommandations des conseillers favorisent les fonds qui génèrent des commissions plus élevées.
Le reste du monde est déjà au courant de ce phénomène. C’est pourquoi le Royaume-Uni et l’Australie ont interdit ce type de rémunération pour les conseillers. Ceux-ci doivent discuter ouvertement de leurs honoraires avec leurs clients et expliquer clairement leur proposition de valeur par rapport au tarif qu’ils demandent. Ça ne pourrait pas être plus clair, ni plus simple!
En juin, les ACVM ont ENFIN publié une série de propositions pour régler ces problèmes3… puis elles ont reculé. Leurs propositions les plus récentes énoncent les exigences suivantes :
- Une divulgation accrue des conflits d’intérêts entre les conseillers et leurs clients. Cela se traduira simplement par des paragraphes additionnels en petits caractères.
- L’interdiction des frais de vente reportés sous toutes leurs formes. C’est très bien, mais c’est loin d’être suffisant! Qu’en est-il des commissions de suivi?
- L’interdiction des commissions de suivi… mais seulement dans les comptes de courtage à escompte. Si les autorités ne réglementent pas cet aspect, les tribunaux les obligeront à le faire. Un recours collectif est d’ailleurs en cours à ce sujet.
Dans l’ensemble, ces propositions sont bien loin de bannir complètement les mécanismes de rémunération intégrés. Pourquoi les organismes de réglementation canadiens mettent-ils autant de temps à se rendre à l’évidence? Au bout de six ans, c’est tout ce qu’ils sont capables de proposer?
Malheureusement, le secteur des fonds a tout intérêt à maintenir le statu quo. Selon Strategic Insight, environ la moitié de la valeur de 1,5 billion de dollars détenue dans les fonds communs de placement a été vendue avec une forme ou une autre de rémunération intégrée. Une interdiction générale aurait des répercussions énormes sur l’industrie.
Il me semble – corrigez-moi si je me trompe – que les règlements sont censés protéger les individus, pas l’industrie. J’espère que les autorités de réglementation de notre pays finiront par le comprendre et par prendre les mesures qui s’imposent.
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